A quelques jours de Noël, vous êtes pris comme chaque année d’une angoisse sourde, en bon écolo face à cette avalanche de gaspillage de cadeaux ? Alors offrez utile aves des cadeaux qui font réfléchir. L’écolo des montagnes vous conseille deux livres à glisser sous le sapin pour faire rimer écologie avec esprit.
Tout d’abord, pour les amoureux.ses de la littérature, il y a le dernier ouvrage (et premier roman) de Corinne Morel Darleux, La Sauvagière[1]. La militante éco-socialiste du Vercors et ancienne conseillère régionale nous avait habitués jusque-là à des ouvrages très politiques, comme son sublime essai Plutôt couler en beauté que flotter sans grâce. En s’essayant cette fois-ci à la fiction, l’autrice réussit le tour de force de faire passer ses convictions écolos dans une fable onirique extrêmement poétique, au sens le plus noble du terme. Après un accident de moto, l’héroïne de l’ouvrage se retrouve perdue dans une cabane en forêt, en marge du monde et de ses injonctions permanentes, à devoir réapprendre à se servir de son corps et de sa conscience, dans un rapport au temps et à la nature totalement bouleversé, aux côtés de deux femmes rebelles et extrêmement mystérieuses, Jeanne et Stella. En ces temps où le « réensauvagement » est à la mode dans les milieux écolos, porté par des auteurs comme Baptiste Morizot, Corinne Morel Darleux répond avec maestria à la question fondamentale posée récemment par Amitav Gosh dans son excellent essai Le Grand Dérangement : pourquoi le climat et l’environnement sont-ils à ce point absents de la littérature contemporaine ? A l’heure de l’urgence climatique absolue, il est urgent d’investir le champ de la littérature pour réécrire l’histoire de la modernité et offrir d’autres récits possibles pour l’humanité. C’est ce à quoi s’attelle Corinne Morel Darleux avec La Sauvagière, à lire et offrir sans modération.
Un autre ouvrage à offrir pour les fêtes, cette fois-ci dans la catégorie essai, Les Sept piliers de la Cité[2], de mon ami Edouard Gaudot. En un peu plus de 300 pages, et partant de son expérience personnelle très riche tant dans le milieu éducatif (ancien prof) que dans celui de la politique institutionnelle (conseiller au Parlement européen), l’auteur a pour ambition de tenter de « guérir la politique ». Comment réconcilier engagement personnel et collectif, comment s’émanciper de toutes les dominations, comment cesser de détruire sans cesse la nature et donc nous-mêmes sur l’autel du pouvoir et de l’argent ? Avec ses sept piliers, Edouard nous offre une piste, un chemin à suivre pour tenter de rehausser notre niveau de conscience individuel et collectif et de remplir enfin les quatre quadrants de Ken Wilber[3]. Imaginez la possibilité de réconcilier politique et spiritualité dans le sens d’une réelle émancipation, loin des délires de domination des grandes religions constituées. Imaginez la possibilité de regrouper les adeptes de l’écologie politique et du développement personnel dans une optique de changement réel, intérieur et extérieur. Imaginez une nouvelle humanité enfin réconciliée avec l’ensemble du vivant, donc avec elle-même, guidée par les liens et guérie de l’appât du gain. En construisant ces sept piliers, nous en serions plus près que jamais. Alors n’hésitez pas à glisser de l’intelligence sous le sapin, à des années lumières de l’abrutissement généralisé et des passions tristes colportées par les médias Bolloré.
Joyeux Noël et bonne lecture !
[1] Voir https://www.editionsdalva.fr/livre/la-sauvagiere
[2] Voir https://www.sorbonne-universite.fr/parutions/les-sept-piliers-de-la-cite
[3] Lire notamment http://etincelle-theatre-forum.com/lapproche-integrale-de-ken-wilber-2/